3.1 L’âge d’or du vaudeville et du burlesque

 

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Le théâtre Scala, rue Saint-Laurent
(Montréal), vers 1915

Le vaudeville et le burlesque sont des types de divertissement qui seront extrêmement populaires un peu partout en Amérique du Nord, y compris au Canada français et au Québec. Le vaudeville est un style théâtral essentiellement basé sur les péripéties et les situations cocasses, où la surprise et l’imprévu occupent une place importante. Le spectacle burlesque typique est lui constitué d’une suite de courts numéros de variétés : du chant, de la danse, de la musique, des sketches humoristiques ou des saynètes parodiques, en plus de présenter à l’occasion des petits films, des actualités (Newsreel) et diverses attractions inspirées du cirque (femme à barbe, homme-marteau, phénomènes curieux, etc.). Cette catégorie de productions « légères » monopolisera un grand nombre de salles de spectacle entre 1930 et 1950. C’est l’âge d’or du vaudeville et du burlesque, qui prendra fin avec l’arrivée de la télévision.

Jean Grimaldi, directeur de tournées
de théâtre burlesque, en compagnie
d’Olivier Guimond fils, 1953

Au tournant du XXe siècle, les spectacles de burlesque étaient presque toujours présentés par des troupes en tournées qui ne visitaient que Montréal et Québec, organisées par la compagnie américaine Columbia Circuit. L’ensemble de ce répertoire était donc en anglais, interprété par des comédiens étrangers, majoritairement américains. Toutefois, la langue ne nuisait guère à la compréhension des sketches et des « gags », car l’effet comique résidait surtout dans un style de jeu très physique, ou dans des situations extrêmes à la Charlie Chaplin. C’est au cours des années 1910 que la troupe d’Arthur Petrie commence à présenter du burlesque en français, suivie par d’autres troupes, dont celle d’Olivier Guimond père, dit Ti-Zoune, au grand plaisir des spectateurs francophones. Il faudra cependant attendre la Crise économique des années 1930, qui met fin aux tournées américaines, pour que se développe une masse critique de spectacles en français, qui seront toujours largement inspirés des canevas de base, des blagues et des sketches américains.

Amanda Alarie

Au Manitoba, André Castelein de la Lande (1873-1963), fondateur du Cercle Molière, promeut également la comédie et le vaudeville avec des spectacles comme Le secret du prêtre (1929), La goélette (1934), Il faut que femme cède (1934), Lui, elle et belle-maman (1934) et Le voleur (1935). Au Québec, le Théâtre National de Montréal1, dirigé par Rose Ouellet dite La Poune, permet à plusieurs as du burlesque de peaufiner leur talent : Olivier Guimond père, Effie Mac, Pic-Pic, Juliette Béliveau, Hector Pellerin, Rose Rey Duzil, Marie-Jeanne Bélanger, Arthur et Juliette Petrie, Paul Desmarteaux et bien d’autres. On dit de cette salle qu’elle était une sorte de palais du rire à Montréal. Entre 1930 et 1950, la troupe de Jean Grimaldi2, également réputée, présente de grandes tournées à travers le Québec, en Ontario et dans l’est des États-Unis.

L’arrivée de la télévision et l’apparition des cabarets mettront progressivement un terme au burlesque. D’un côté, les cabarets proposent des spectacles de variétés faisant appel aux mêmes comédiens et chanteurs que le burlesque, ce qui force les propriétaires à offrir de meilleures conditions de travail, alors qu’il est plus difficile de rentabiliser une grande salle qu’un petit cabaret (où l’on vend de l’alcool). D’un autre côté, la télévision offre un divertissement gratuit sans avoir à quitter son domicile. Plusieurs vedettes du théâtre de variétés de la première moitié du XXe siècle seront d’ailleurs « récupérées » par les productions télévisuelles extrêmement populaires, comme la très célèbre série Les Plouffes3 qui entre en onde en 1953. Fait intéressant, c’est grâce à la télévision que certains numéros de burlesque sont passés à la postérité et font désormais partie de notre patrimoine scénique : par exemple le sketch Trois heures du matin, créé par Olivier Guimond fils et Manda Parent, qui met en scène une épouse costaude refusant de laisser entrer son chétif mari à la maison parce qu’il est soûl, après une soirée bien arrosée entre amis. Ce sketch est devenu un classique du genre!

1 Rose Ouellette, dite La Poune (1903-1996), présidera aux destinées de cette institution de 1936 à 1953. Elle innovera en offrant aux comédiens au chômage des contrats de longue durée… en pleine Crise économique.

2 En 1948, Grimaldi achète le Canadien puis, comme cette salle de 600 sièges s’avère rapidement trop petite, il acquiert le Gayety, qui compte environ 1000 places : ce dernier deviendra le Radio-Cité et recevra la visite de grandes vedettes internationales comme Charles Trenet, Lucienne Boyer ou Georges Guétary.

3 Tirée du roman du même nom de Roger Lemelin, publié en 1948.

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